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L’auteur et interprète français Jean Guidoni est décédé ce 21 novembre à l’âge de 74 ans, des « suites d’une maladie fulgurante » selon son attaché de presse. Cet artiste singulier, peu disposé à intégrer les codes du showbiz, aura marqué son époque par son expressivité, sa radicalité et sa poésie.
Personnalité singulière, artiste de grand talent, cultivant le goût de la provocation, poète reconnu et largement suivi par un public fidèle, Jean Guidoni était né le 3 mai 1952 à Toulon. Fils de marin, c’est à Marseille qu’il grandit. Il commence sa vie professionnelle en exerçant divers métiers, dont celui de coiffeur. La vie nocturne de la cité phocéenne deviendra une source d’inspiration inépuisable pour ses futures œuvres. Il « montera » ensuite à Paris.
En 1975, Guidoni sort son premier 45 tours, « La leçon d’amour », mais c’est en rencontrant Michel Legrand qu’il trouve une vraie direction artistique. Leur amitié est immédiate même s’il faudra attendre une vingtaine d’années pour qu’ils travaillent ensemble. Jean Guidoni participe à la comédie musicale Paris Populi et sort son premier album éponyme en 1977, accompagné du 45 tours « Le têtard », écrit par le célèbre Jacques Lanzmann. Il acquiert une certaine notoriété et accompagne Marie-Paule Belle et Serge Lama en tournée.
En 1978, c’est un choc esthétique qui va lui permettre de trouver sa voie : lors d’un concert de la chanteuse allemande Ingrid Caven, ex-épouse de Rainer Werner Fassbinder, il découvre un univers sombre, imprégné de l’ambiance du Berlin des années 1920. Il rencontre alors Pierre Philippe, traducteur de Kurt Weill, qui a adapté quelques-uns des textes de la chanteuse. Celui-ci devient alors un collaborateur clé.
Les années 1980 sont synonymes de révélation de l’artiste Guidoni et de la reconnaissance du public. En novembre 1980, il se produit au Théâtre en Rond, se dévoilant avec ses blessures et angoisses. Son album Je marche dans les villes reçoit le prix de l’Académie Charles-Cros en 1981. L’année suivante, il intègre une grande maison de disques et monte le spectacle Crime passionnel aux Bouffes du Nord, en collaboration avec Astor Piazzolla. L’album du même nom reste l’un de ses plus populaires et une pièce maitresse de son répertoire.
Un auteur qui affronte et se confronte aux sujets de société
En 1985, l’album Putains est consacré à la prostitution. Il est controversé et peu diffusé à la radio. Après cela, Guidoni et Pierre Philippe cessent leur collaboration. En 1987, Guidoni sort « Tigre de porcelaine », un album plus accessible qui lui vaut un second prix de l’Académie Charles-Cros. Il continue bien évidemment à se produire sur scène.
Le début de la décennie suivante est marqué par un épuisement certain, suivi d’une dépression, il se retire alors de la scène. En 1991, il publie un livre qui revient sur cet épisode, Quelques jours de trop, puis revient avec un spectacle à l’Auditorium des Halles. Les textes paraissent un peu moins noirs que dans les années 1980, même si Jean Guidoni est un auteur qui affronte et se confronte aux sujets de société, la misère, le racisme, le sida, etc.
En 1995, Guidoni collabore avec Michel Legrand sur l’album Vertigo et le duo monte le spectacle Comment faire partie de l’orchestre au Casino de Paris en 1996. En 1999, il retrouve Pierre Philippe pour un nouveau spectacle au théâtre Sylvia-Monfort. En 2000, il reprend Crime passionnel au Cabaret Sauvage.
Les décennies suivantes seront certes moins sulfureuses, mais tout aussi créatives. Des albums de chansons originales, des collaborations avec de jeunes auteurs-compositeurs, des hommages au poète Jacques Prévert ou encore à l’auteur-compositeur Allain Leprest disparu en 2011.
En 2017, Guidoni sort l’album Légendes urbaines, salué par la critique. Après une longue tournée, il sort en 2022 l’album Avec des si, marquant un retour symbolique au théâtre des Bouffes du Nord, 40 ans après Crime passionnel. Son dernier et 17e album était paru en avril dernier, Eldorado(s).
V. P.
