Les organisateurs de l’Eurovision ont annoncé vendredi 21 novembre des modifications des règles de vote du concours musical pour renforcer la « confiance » et la « transparence », alors que le soutien public massif attribué aux candidats israéliens ces dernières années a suscité la controverse. Une démarche dans un souci d’apaiser des tensions au sein de l’Union européenne de radio-télévision où certains diffuseurs ont appelé à boycotter le concours en cas de participation d’Israël en 2026.
L’Union européenne de radio-télévision (UER) a annoncé dans un communiqué mettre en œuvre une série de « modifications importantes », notamment en réduisant de moitié le nombre de votes que chaque membre du public peut exprimer. Les organisateurs entendent aussi renforcer leurs efforts pour « détecter et prévenir toute activité de vote frauduleuse ou coordonnée. »
« Nous prenons des mesures claires et décisives, afin que l’Eurovision continue de célébrer la musique et l’unité. Il est en effet important qu’il reste un espace neutre et qu’il ne soit pas instrumentalisé », a déclaré le directeur du Concours Eurovision de la Chanson, Martin Green, dans le communiqué. L’UER reste convaincue « de la validité et de la fiabilité du résultat de l’édition 2025 », mais souligne que les modifications introduites « offriront des garanties renforcées ».
Moins de vote du public, jury renforcé
Plusieurs pays, parmi lesquels l’Espagne, l’Irlande et les Pays-Bas, ont annoncé qu’ils n’enverraient pas de représentant au concours à Vienne en mai prochain siIsraël est autorisé à participer. D’autres pays, comme la Belgique et la Suède, réfléchissent aussi à un boycott.
Tous les habitants des dizaines de pays participants peuvent voter, par téléphone, SMS ou en ligne. Dans chaque pays, un jury de professionnels vote également. Ces deux votes ont le même poids. Il n’est pas possible de voter pour son propre pays. Mais désormais, le nombre maximal de voix par mode de paiement « passera de 20 à 10 ».
Composés d’experts de la musique, les jurys de professionnels, qui comptent pour moitié dans la finale, feront leur retour dans les demi-finales, une première depuis 2022. Les jurés devront signer une déclaration formelle confirmant qu’ils voteront « en toute indépendance et impartialité ». Par ailleurs, les nouvelles mesures « découragent vivement toute campagne promotionnelle disproportionnée (…), en particulier si celle-ci est lancée ou appuyée par des tiers, notamment un gouvernement ou une agence gouvernementale ».
« L’UER essaie de temporiser et de donner des gages à l’Espagne, l’Irlande et les Pays-Bas »
Pour Fabien Randanne, journaliste à 20 Minutes, spécialiste de l’Eurovision, ces changements de règles ne vont pas pour autant enrayer toute fraude présumée. « Il est toujours possible qu’il y ait des irrégularités. On peut imaginer des gens s’équiper de plusieurs cartes SIM pour multiplier les votes. Surtout que d’un pays à l’autre, la mobilisation du grand public n’est pas forcément la plus large », explique-t-il.
L’UER essaie de temporiser et de donner des gages à l’Espagne, l’Irlande, les Pays-Bas notamment, dont les diffuseurs ont dit “si Israël participe à l’édition 2026, nous n’y serons pas”.
Est-ce pour autant suffisant ? Pas si sûr, prévient Fabien Randanne, également auteur de Queerovision: Histoire(s) de la plus grande scène du monde. Pour le journaliste, tout va se jouer dans les prochaines semaines.
« Il faudra voir ce qu’il va se passer dans les prochaines semaines qui vont être cruciales, avec notamment les 4 et 5 décembre, l’Assemblée générale des diffuseurs membres de l’UER. Au départ, il était question que les diffuseurs votent pour ou contre le maintien d’Israël à l’Eurovision, mais il semblerait qu’avec l’annonce de ces nouvelles règles, ce sujet-là ne soit plus à l’ordre du jour sauf si des diffuseurs demandent à ce que la question soit mise sur la table et il y a fort à penser que les diffuseurs espagnols et irlandais mettront ce sujet sur la table », juge Fabien Randanne.
« Même si ça semble être une sorte de compromis, plusieurs diffuseurs ne vont pas l’entendre de cette oreille et vont continuer à demander le retrait d’Israël. »
La liste des participants de l’édition 2026 attendue « avant Noël »
La liste des pays participant à l’édition 2026 « sera dévoilée avant Noël ». Cette année, la chanteuse israélienne Yuval Raphael, survivante de l’attaque du 7-Octobre, était arrivée deuxième au concours, portée par le vote du public. Plusieurs diffuseurs du concours avaient demandé que la lumière soit faite sur le détail des votes. En 2024 aussi, les jurys nationaux avaient largement snobé Israël. Mais le vote du public avait donné un spectaculaire coup de pouce à la candidate israélienne, Eden Golan, la catapultant à la cinquième place.
L’Eurovision est régulièrement le théâtre d’oppositions géopolitiques. La Russie a été exclue à la suite de l’invasion de l’Ukraine en 2022. La Biélorussie l’avait été un an plus tôt après la réélection contestée du présidentAlexandre Loukachenko.
Alors que le concours se veut apolitique, des polémiques surgissent régulièrement, notamment autour des paroles des chansons. L’UER a d’ailleurs affirmé ce vendredi vouloir renforcer ses efforts « pour empêcher toute utilisation abusive du Concours, notamment dans les paroles ou la mise en scène des chansons. »
F. C.
INTERFIL ALGERIE Soyez le premier informé