Réunis ce vendredi 16 mai à Istanbul pour leurs premiers pourparlers de paix depuis le printemps 2022, Russes et Ukrainiens ont discuté d’une rencontre Zelensky-Poutine et se sont mis d’accord sur un échange important de prisonniers, mais pas sur un cessez-le-feu.
En l’absence des présidents Volodymyr Zelensky et Vladimir Poutine, les espoirs de voir les délégations russe et ukrainienne envoyées à Istanbul esquisser un pas vers un cessez-le-feu durable étaient minces. Les États-Unis « n’ont pas de grandes attentes », avait admis le secrétaire d’État américain Marco Rubio jeudi soir, Donald Trump estimant quant à lui que « rien ne se passerait » tant qu’il ne rencontrerait pas son homologue russe. Un tel sommet est « certainement nécessaire », a acquiescé ce vendredi le Kremlin.
Les deux délégations, menées par le ministre de la Défense côté ukrainien et par un conseiller présidentiel de second plan côté russe, ont échangé pendant environ une heure quarante, entourées des médiateurs turcs, au palais de Dolmabahçe. La rencontre s’est soldée sans annonce de cessez-le-feu, pourtant « la priorité » affichée par Kiev et ses alliés. Les deux camps doivent désormais « présenter » et « détailler » leur « vision » d’une telle trêve, a affirmé le négociateur russe Vladimir Medinski lors d’une brève allocution à la presse.
Ukrainiens et Russes ont toutefois annoncé s’être mis d’accord pour un échange « massif » de prisonniers, a indiqué le conseiller de Vladimir Poutine, « à raison de 1 000 contre 1 000 », et ce « dans les prochains jours ». « Un grand résultat », s’est félicité Gueorgiï Tykhy, le porte-parole de la diplomatie ukrainienne. Les chefs des deux délégations ont précisé que la partie ukrainienne avait également évoqué une éventuelle rencontre entre les présidents Volodymyr Zelensky et Vladimir Poutine – ce qui serait une première depuis le début de l’invasion russe –, le négociateur russe indiquant simplement que Moscou avait « pris note de cette demande ». Cela doit être « la prochaine étape », a martelé de son côté le négociateur ukrainien face aux journalistes.
Des exigences maximalistes jugées « inacceptables »
Côté ukrainien, une source diplomatique interrogée par l’AFP, a estimé que les négociateurs russes ont « présenté des demandes inacceptables qui vont au-delà de ce qui a été discuté avant la réunion », dont le retrait des forces de Kiev de « vastes parties du territoire » ukrainien, avant l’instauration du cessez-le-feu réclamé par l’Ukraine et ses alliés. Face à la presse, Gueorgiï Tykhy a toutefois assuré que l’équipe de Kiev avait su garder « son calme » lors des échanges. Avant la réunion, Vladimir Medinski avait répété que Moscou voulait discuter des « causes profondes » du conflit et considérait ces pourparlers comme « la suite » de ceux avortés en 2022, aux cours desquels les Russes avaient campé sur ces positions maximalistes, inacceptables pour Kiev et ses alliés.
En déplacement en Albanie pour un sommet européen, Volodymyr Zelensky a appelé ses alliés à « une réaction forte » et des « sanctions » contre Moscou en cas d’échec des discussions. Le chef de l’État français Emmanuel Macron a jugé « inacceptable » que la Russie n’ait pas répondu favorablement à l’appel de trêve, tandis que le chancelier Friedrich Merz a salué de son côté de la tenue même des négociations, un « premier signal, tout petit mais positif ». Les dirigeants ukrainien, allemand, français, britannique et polonais ont ensuite échangé au téléphone avec le président américain Donald Trump.
Le week-end dernier, Vladimir Poutine avait surpris en proposant des négociations directes avec Kiev. Mais, mis au défi par Volodymyr Zelensky de se rendre à Istanbul pour négocier avec lui, le président russe n’a cependant pas fait le déplacement. Kiev, ses partenaires européens et Washington avaient posé un ultimatum à Vladimir Poutine : accepter un cessez-le-feu préalable à des discussions, ou bien subir des sanctions « massives ». Une demande rejetée par Vladimir Poutine, au motif qu’une trêve prolongée permettrait à l’armée ukrainienne de se renforcer en recevant des armes occidentales, alors que les soldats russes ont l’avantage sur le front et occupent toujours près de 20% du territoire ukrainien.
M. B.