jeudi 28 mars 2024
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République tchèque : Petr Pavel remporte l’élection présidentielle

Général à la retraite de l’Alliance atlantique, ancien parachutiste d’élite, Petr Pavel a largement remporté le second tour de la présidentielle tchèque, ce samedi 28 janvier. Il obtient 58,32% des voix, contre 41,67% pour son adversaire Andrej Babiš, qui l’a félicité.

Le général Petr Pavel, ex-chef du Comité militaire de l’Otan et partisan de l’aide militaire et financière à l’Ukraine, est le nouveau chef de l’État tchèque. La fonction est essentiellement honorifique, mais tout de même, le président nomme le gouvernement, choisit le gouverneur de la Banque centrale, les juges de la Cour constitutionnelle, et il assure enfin le commandement suprême des forces armées.

L’officier à la retraite, âgé de 61 ans, faisant face à l’ancien Premier ministre milliardaire Andrej Babiš, 68 ans. Il a déclaré durant la campagne électorale qu’il voulait être « un président digne », pour ce pays qui est membre de l’UE et de l’Otan. Il succède à Miloš Zeman, qui avait entretenu des liens étroits avec Moscou jusqu’au début de « l’opération spéciale » russe, comme dit le Kremlin, avant de s’en éloigner.

La République tchèque abrite environ 10,5 millions de personnes. La participation est haute, 70,25%, à l’issue d’une campagne d’entre-deux-tours dure. Petr Pavel était arrivé en tête du premier tour devant M. Babiš, il y a quinze jours, avec 35,4% des suffrages contre 35% pour M. Babiš, actuellement député, et qui a tenté de se présenter comme moins interventionniste que son adversaire sur l’Ukraine.

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a salué le « ferme attachement » du nouveau président tchèque aux « valeurs européennes ». « Votre expérience en matière de sécurité, de défense et de relations extérieures sera précieuse pour maintenir et renforcer l’unité de l’Europe au service de l’Ukraine », a ajouté l’ancienne ministre fédérale allemande de la Défense.

« Petr Pavel a eu le triomphe modeste, au terme d’une campagne rugueuse ces derniers jours, sa première campagne électorale entamée il y a plusieurs années avec une longue tournée dans ce pays d’Europe centrale pour récolter des dizaines de milliers de signatures nécessaires à sa candidature. »

Soutien de la candidature de l’Ukraine à l’UE

Après Václav Havel, Václav Klaus et Miloš Zeman, Petr Pavel sera le quatrième président de la République tchèque depuis la scission avec la Slovaquie, en 1993, quatre ans après la fin du régime communiste tchécoslovaque sous influence soviétique. Il est considéré comme un héros de la guerre en ex-Yougoslavie, au cours de laquelle il avait notamment aidé à libérer des soldats français.

Chef de l’état-major tchèque par la suite, avant d’occuper, en 2015 et 2018, la présidence du Comité militaire de l’Otan, plus haut poste de responsable militaire de l’Alliance atlantique, le nouveau chef de l’État fait office d’ardent défenseur de l’appartenance de son pays à l’UE et à l’Otan, bien qu’il ait été, dans les années 1980, comme son adversaire du jour au demeurant, membre du Parti communiste.

M. Pavel se veut indépendant des jeux partisans. Il souhaite prolonger le soutien de Prague aux autorités de Kiev, et appuyer la candidature de l’Ukraine à l’Union européenne. M. Babiš a fait campagne contre lui en s’adressant aux inquiets des retombées du conflit, l’ancien chef du gouvernement laissant entendre que son adversaire pourrait entraîner le pays dans cette guerre.

Andrej Babiš s’était même attiré les regards à l’étranger en déclarant qu’il n’enverrait pas de troupes tchèques en aide à la Pologne ou aux pays baltes face à la Russie dans le cadre de la défense collective de l’Otan, pilier numéro un de l’organisation politico-militaire. Des propos sur lesquels il était aussitôt revenu. Une anecdote qui en dit long sur le rôle qu’a joué l’Ukraine dans cette campagne.

Zelensky : « L’intérêt d’une Europe unie »

Petr Pavel a troqué l’uniforme militaire pour la chemise en flanelle pendant la campagne électorale, c’est un nouveau venu en politique. Il est parvenu à battre l’ex-chef du gouvernement Babiš, qui avait été reçu à l’Élysée par le président français Emmanuel Macron juste avant le premier tour, après une campagne tout à fait réussie.

M. Pavel prêtera serment au château de Prague, le 9 mars prochain. Parmi les premiers à l’avoir félicité pour sa victoire ce samedi : le président ukrainien. « J’apprécie votre soutien à l’Ukraine et à notre combat contre l’agression russe», a notamment indiqué Volodymyr Zelensky, ajoutant vouloir œuvrer avec lui « au bénéfice des peuples ukrainien et tchèque et dans l’intérêt d’une Europe unie ».

« Naturellement, l’Ukraine doit d’abord remplir toutes les conditions pour en devenir membre, comme du progrès dans la lutte contre la corruption. Mais je pense qu’elle a le droit d’avoir les mêmes chances que nous avons eues dans le passé », avait déclaré M. Pavel, au sujet de la candidature ukrainienne pour l’UE, pendant la campagne électorale – Prague a rejoint l’Union en mai 2004.

« Des valeurs telles que la vérité, la dignité, le respect et l’humilité ont gagné dans cette élection », déclare à présent le président élu de République tchèque. « Cela doit changer, et vous m’avez aidé à faire le premier pas sur la voie de ce changement », a-t-il également lancé, en référence au « style politique qui a récemment prévalu ici ».

La guerre en cours a certes donné une certaine légitimité à ce gradé de haut rang. Mais les Tchèques ont aussi souhaité, par ce vote, mettre Andrej Babiš sur la touche, après plusieurs années au gouvernement, des procédures judiciaires à n’en plus finir et une omniprésence dans les domaines de la politique, de l’économie et des médias.

« Les attentes sont celles d’un électorat qui est principalement de centre droit. »

M. B.