vendredi 2 mai 2025
Accueil > A la UNE > Liban : accusé de détournements de fonds, Riad Salamé attendu par la justice française

Liban : accusé de détournements de fonds, Riad Salamé attendu par la justice française

Riad Salamé est convoqué ce mardi 16 mai dans la matinée par la justice française. Mais rien ne dit qu’il sera dans le bureau de la juge qui lui a donné rendez-vous. Le gouverneur de la Banque centrale du Liban est cité dans plusieurs enquêtes portant sur des détournements de fonds, notamment en France où l’attend une mise en examen.

Que Riad Salamé se rende ou non à Paris ce mardi, les dossiers sont là. Gouverneur de la Banque centrale du Liban depuis 30 ans, l’homme intéresse les juges libanais, suisse, luxembourgeois, allemands et français. Les enquêteurs de ces différents pays cherchent à comprendre comment Riad Salamé a constitué sa fortune considérable. À 72 ans, il rappelle qu’il a travaillé comme banquier d’affaires.

Mais la plainte déposée en France évoque des biens mal acquis, possiblement au détriment des épargnants libanais. De luxueuses propriétés appartenant à Riad Salamé et à son entourage ont été saisies. L’une de ses proches est déjà mise en examen en France, et à plusieurs reprises, un trio de juges européens s’est rendu à Beyrouth pour entendre conjointement le gouverneur de la Banque centrale ainsi que différents témoins.

Soupçonné de détournement de fonds, Riad Salamé est par ailleurs critiqué pour sa responsabilité dans le naufrage économique historique de son pays. Nombreux sont les Libanais qui se demandent qui sont les soutiens de cet homme qui a réussi à conserver son poste jusqu’à la fin de son cinquième mandat, dans quelque semaines.

Dans un Liban économiquement ruiné, on compte sur la justice pour que les responsables paient

Les procureurs soupçonnent Riad Salamé, le gouverneur de la Banque du Liban, d’avoir détourné plus de 300 millions de dollars de fonds publics, dont une partie pour acheter des propriétés en Europe. Ces accusations surviennent alors que le pays traverse l’une des pires crises économiques de son histoire. Les épargnants ont vu leurs économies partir en fumée. En France, la diaspora se mobilise pour les aider et espère que les responsables rendent des comptes.

Nadine Ghorayeb ne compte plus ses proches démunis au Liban. Leurs salaires ont fondu avec la dévaluation de la monnaie nationale, qui a perdu près de 100% de sa valeur en trois ans. « Un ami touchait l’équivalent de 2 500 dollars par mois. Aujourd’hui, il gagne 150 dollars. Qui peut vivre avec 150 dollars par mois ? », confie l’avocate, rencontrée par Nicolas Feldmann à Paris.

Pour aider ses proches, cette Franco-Libanaise collecte des médicaments, récolte des lunettes pour une association… Mais le plus important reste l’envoi d’argent : « Ça varie… Mais avec 100 euros, on peut aider une personne. Même des petites sommes sont très significatives. C’est à ce point que la situation est dramatique. »

L’avocate mise également sur le droit. Avec un confrère à Beyrouth, elle accompagne plusieurs déposants dont les économies sont bloquées dans les banques libanaises. « On est en train d’introduire des actions au niveau individuel civil contre les établissements bancaires qui tiennent les comptes de ces déposants, parce qu’ils ne peuvent plus récupérer leur argent », explique-t-elle.

Dans ce contexte, comment imaginer que l’un des responsables du marasme économique, le gouverneur de la banque du Liban, ait pu détourner – comme le soupçonnent les enquêteurs français – de l’argent public à des fins personnelles ? Sa possible mise en examen ouvrirait en France la voie à un procès. « Je compte sur la justice pour faire justice », insiste Nadine Ghorayeb.

Si Riad Salamé était reconnu coupable de « détournements de fonds publics », la loi en France permettrait de restituer ces « biens mal acquis » à la population spoliée.

M. B.