mardi 16 avril 2024
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Unfinished apartment buildings at the construction site of a China Evergrande Group development in Beijing, China, on Thursday, Jan. 6, 2021. Evergrande is seeking to delay an option for investors to demand early repayment on one of its yuan-denominated bonds, in the latest sign of distress amid a broader real estate debt crisis. Photographer: Andrea Verdelli/Bloomberg

Chine/Pékin à la peine pour endiguer la crise de l’immobilier

. La Banque centrale chinoise a procédé, lundi, à une nouvelle baisse de taux afin de stabiliser le marché de l’immobilier.

. La crise est profonde, marquée par une inquiétude des Chinois face à la situation économique.

Nouvelle tentative pour stimuler un secteur immobilier aux abois. La Banque centrale chinoise (PBOC) a procédé lundi à une nouvelle baisse de taux. Le « loan prime rate » (LPR) à cinq ans, une référence pour les prêts hypothécaires, a été réduit de 15 points de base à 4,3 % après avoir été réduit de la même ampleur en mai. Celui à un an a été ramené de 3,7 % à 3,65 %, la première réduction depuis janvier. Cette mesure était largement attendue des économistes après la décision surprise, une semaine auparavant, d’une baisse de deux des taux directeurs de la PBOC. Ces baisses de taux sont la dernière initiative d’une série de mesures visant à soutenir un secteur immobilier dont la situation ne cesse de se dégrader. Il joue un rôle clé dans la deuxième économie mondiale : l’immobilier au sens large (construction, ameublement, etc.) représente près de 30 % du PIB chinois et 20 % des emplois. Seule l’Espagne des années 2007- 2008 était dans une situation comparable. Il constitue le principal secteur d’investissement des épargnants chinois (90 % des ménages possèdent leur résidence principale) et une source de revenus primordiale pour les collectivités locales (la vente de terrains peut représenter jusqu’à 45 % de leurs recettes).

Boycott des remboursements

La crise immobilière exacerbe un sévère ralentissement de l’économie chinoise, fortement impactée par les restrictions liées à la politique « zéro Covid ». Tous les indicateurs sont au rouge : les investissements immobiliers continuent de se contracter (–6,4 % sur les sept premiers mois de l’année) tandis que les ventes se replient de 23,1 % depuis janvier. Depuis la crise d’Evergrande il y a un an, les difficultés des promoteurs immobiliers s’accumulent : confrontés à des graves problèmes de financement, ils font désormais face à des campagnes de boycott des remboursements d’emprunts de certains acquéreurs mécontents de voir leur livraison de logement retardée par l’arrêt des mises en chantier. « Après les confinements de 2020, le secteur immobilier a rapidement rebondi, incitant les décideurs à agir pour empêcher la surchauffe des ventes et des prix des maisons, note Wei He du cabinet d’études Gavekal Dragonomics. Cette fois, le secteur est dans une récession prolongée et montre peu de signes d’amélioration substantielle dans un avenir proche. » Les autorités, les banques, les entreprises publiques multiplient les initiatives pour essayer de stabiliser le secteur. Face aux risques de défauts de paiement des promoteurs immobiliers, l’assureur public China Bond Insurance a été prié de garantir directement et à 100 % les obligations et les actifs de six développeurs. Des fonds de renflouements ont été mis en place par certaines collectivités locales pour garantir que les projets immobiliers bloqués soient livrés aux acheteurs. Des mesures visant à stimuler les achats immobiliers ont été mises en œuvre dans plus de 200 villes selon le journal « Caixin ». A Nanjing, Suzhou ou Wuxi, les exigences d’apports personnels pour l’achat d’un second bien ont été réduites.

Les baisses de taux « permettront de réduire les paiements d’intérêts sur les prêts existants, ce qui soulagera les entreprises endettées. Elles auront également pour effet de faire baisser le prix des nouveaux prêts », estime l’analyste Julian Evans-Pritchard, du cabinet Capital Economics. Néanmoins, cette décision risque d’être insuffisante pour revigorer l’économie. « La faiblesse actuelle de la demande de prêts est en partie structurelle, reflétant une perte de confiance dans le marché du logement et l’incertitude causée par les perturbations récurrentes de la stratégie “zéro Covid” de la Chine », poursuit Julian Evans-Pritchard, pour qui ces « freins ne peuvent pas être facilement levés par la politique monétaire ». Inquiet de la conjoncture, de plus en plus de ménages économisent. La demande de crédit s’est fortement affaiblie en juillet, tandis que les banques regorgent de liquidités mais ne veulent pas ou ont du mal à financer des projets. Certains économistes commencent à mettre en garde contre une « trappe à liquidité », où les faibles taux d’intérêt ne parviennent pas à stimuler les prêts. L’assouplissement monétaire ne suffira pas à rétablir la confiance.

F. S.