jeudi 1 mai 2025
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Guerre Israël-Hamas : la possible ouverture d’autres fronts contre Israël par les alliés de l’Iran

Israël poursuit ses bombardements sur la bande de Gaza suite à l’attaque lancée le 7 octobre par le Hamas. Malgré les mises en garde occidentales, l’Iran et ses alliés envisagent d’ouvrir d’autres fronts contre Israël.

Malgré la cadence quotidienne et la violence des affrontements entre le Hezbollah et l’armée israélienne qui ont fait des morts et des blessés des deux côtés depuis le 7 octobre, l’escalade à la frontière libano-israélienne reste limitée et sous contrôle. Les échanges de tirs se déroulent principalement dans la zone frontalière et ont globalement épargné les infrastructures civiles et les zones résidentielles, à l’exception de tirs israéliens qui ont tué un journaliste vendredi 13 octobre et deux personnes âgées le lendemain.

À ce stade du conflit, les belligérants s’en tiennent aux règles d’engagement tacitement établies depuis la guerre de 2006 qui ont permis de stabiliser ce front par une dissuasion réciproque. Cependant, les craintes d’une propagation de la guerre qui fait rage à Gaza sont réelles. Lorsque des milliers d’hommes armés jusqu’aux dents et l’esprit chauffé à blanc se font face, une simple erreur d’évaluation est susceptible de provoquer un enchaînement d’événements incontrôlables difficiles à stopper.

C’est justement pour éviter ce type d’erreur d’appréciation de la part des parties en conflit que les canaux indirects sont ouverts en permanence. Celui de la Force internationale des Nations unies au Liban (Finul) déployée est le plus sollicité ces derniers temps mais aussi des canaux diplomatiques à Beyrouth et dans des capitales arabes et occidentales.

« Chambre d’opération commune » pour les alliés de l’Iran

Au-delà de la raison « technique », la guerre pourrait se propager à l’ensemble du Moyen-Orient par une décision prise par l’un des belligérants pour des considérations politiques.

Le Hamas n’est pas une organisation palestinienne isolée. Il fait partie de l’« axe de la Résistance » qui s’étend de Gaza à l’Iran et comprend le Hezbollah, la Syrie, le mouvement yéménite Ansarullah, les groupes chiites irakiens proches de Téhéran ainsi que des milices chiites afghanes – les Fatimides –, dont plusieurs contingents sont actuellement déployés dans l’est et le centre de la Syrie.

Ces deux dernières années, le Hezbollah a joué un rôle de premier plan pour resserrer les rangs de cette alliance en œuvrant à la réconciliation entre le président Bachar el-Assad et le Hamas, accusé par Damas d’avoir soutenu les rebelles syriens les premières années du conflit.

Ces douze derniers mois, la coordination entre certains membres de cet axe a dépassé le cadre politique pour englober la sphère militaire et sécuritaire avec la création d’une « chambre d’opération commune », où des représentants des états-majors du Hezbollah, des Gardiens de la révolution iranienne, du Hamas et du Jihad islamique en Palestine se concertent, échangent des informations et prennent des décisions tactiques. Les décisions stratégiques sont prises, elles, par le commandement politique suprême des différents acteurs avec, bien entendu, un poids décisif pour les hauts dirigeants iraniens, mais aussi pour le secrétaire général du Hezbollah.

Tous les regards sont rivés aujourd’hui sur le leader du parti, Hassan Nasrallah, qui garde le silence depuis le 7 octobre. D’autres dirigeants de la formation pro-iranienne se sont exprimés entre-temps. Le chef du Comité exécutif, Hachem Safieddine, a martelé que le Hezbollah « ne restera pas neutre ». Le président du bloc parlementaire du parti, le député Mohammad Raad, a jugé qu’il « était temps que l’entité temporaire – le nom donné à Israël – disparaisse ». Le secrétaire général adjoint, Cheikh Naïm Qassem a dit que « la Résistance libanaise interviendra le moment propice ».

Face au risque d’une propagation du conflit, le président américain Joe Biden a personnellement mis en garde l’Iran contre une implication dans la guerre et a conseillé aux dirigeants iraniens d’« être prudents ». Le même message en substance a été relayé ce dimanche 15 octobre par le président français Emmanuel Macron lors d’un entretien téléphonique avec son homologue iranien Ebrahim Raïssi.

Des porte-avions américains pour dissuader l’axe conduit par Téhéran

Le conseiller de Joe Biden à la sécurité nationale Jake Sullivan a de son côté affirmé dimanche que les États-Unis ne pouvaient pas « écarter l’hypothèse que l’Iran décide de s’impliquer directement d’une manière ou d’une autre » dans la guerre en cours. « C’est un risque, et c’est un risque dont nous sommes conscients depuis le début » du conflit, a-t-il ajouté.

C’est pour dissuader les ennemis d’Israël d’intervenir directement aux côtés du Hamas que les États-Unis ont dépêché en Méditerranée orientale deux porte-avions. En réponse aux pressions et mises en garde occidentales, l’Iran a activé sa diplomatie en dépêchant son ministre des Affaires étrangères Hossein Amir Abdollahian à Bagdad, Beyrouth, Damas et Doha.

Au Qatar, dernière étape de sa tournée, le chef de la diplomatie iranienne a déclaré samedi 14 octobre que « si les attaques du régime sioniste contre la population sans défense de Gaza se poursuivent, personne ne peut garantir le contrôle de la situation et la perspective d’un élargissement du conflit ». Le ministre iranien, qui s’est également entretenu au téléphone avec son homologue chinois Wang Yi, a déclaré qu’à Beyrouth, Hassan Nasrallah l’a informé que « tous les scénarios sont sur la table » concernant une possible intervention du parti dans le conflit en cours, ajoutant que le Hezbollah a « défini les lignes rouges ».

Des sources proches du parti libanais pro-iranien affirment à RFI que l’ouverture d’autres fronts contre Israël « n’est pas tributaire d’un événement particulier – comme le début d’une offensive terrestre contre Gaza – mais d’une évaluation globale de la situation ».

À cet égard, les milieux du Hezbollah sont confiants dans les capacités du Hamas à infliger « des pertes insupportables » à l’armée israélienne en cas de combats terrestres.

P. K.