Le président chypriote a salué, samedi 17 septembre, la décision « historique » des États-Unis de lever totalement un embargo sur les armes qui frappait – depuis des décennies – l’île méditerranéenne divisée, à condition que Nicosie continue d’empêcher les navires de guerre russes d’accéder à ses ports.
L’embargo sur les armes à l’ensemble de Chypre avait été imposé par Washington en 1987, dans l’espoir d’encourager la réunification de l’île, divisée depuis l’invasion du nord par l’armée turque en 1974, en réaction à un coup d’État de nationalistes chypriotes-grecs qui souhaitaient rattacher l’île à la Grèce. Les États-Unis espéraient ainsi prévenir une course aux armements et encourager un règlement pacifique entre la majorité grecque et la minorité turque.
Une « décision historique »
Le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, a effectivement levé, vendredi 16 septembre, ces restrictions commerciales en matière de défense imposées à Chypre, pays membre de l’Union européenne, a indiqué le porte-parole du Département d’État, Ned Price. « Il s’agit d’une décision historique, qui reflète la relation stratégique en plein essor entre les deux pays, y compris dans le domaine de la sécurité », a rapidement réagi le président chypriote, Nicos Anastasiades, sur son compte Twitter.
Certains critiques affirment que l’embargo américain a été contre-productif dans la mesure où il a contraint Chypre à chercher d’autres partenaires, alors que la Turquie, membre de l’Otan, maintient des troupes dans le nord de l’île contrôlé par l’autoproclamée République turque de Chypre-Nord (RTCN, reconnue uniquement par Ankara). Des responsables américains s’étaient inquiétés du fait que l’embargo ne rapproche Chypre de la Russie, Nicosie ayant signé en 2015 avec Moscou un accord autorisant la marine russe à accéder à ses ports.
« Coopération » avec Washington
En décembre 2019, le Congrès américain avait déjà voté la levée de l’embargo sur les armes pour permettre l’exportation de matériel militaire « non létal ». Avec la levée complète de cet embargo, Chypre doit « poursuivre sa coopération » avec Washington, notamment en « continuant à prendre les mesures nécessaires pour refuser aux navires militaires russes l’accès aux ports pour le ravitaillement et l’entretien », a ajouté M. Price. L’Union européenne (UE) a fermé les ports européens aux navires russes dans le cadre des sanctions prises contre Moscou pour son invasion de l’Ukraine.
La Turquie a « fermement condamné » la décision américaine. Ceci « affectera de manière négative les efforts pour la résolution de la question chypriote et provoquera une course à l’armement sur l’île », a affirmé le ministère turc des Affaires étrangères dans un communiqué. « Avec la levée de l’embargo, les Chypriotes-grecs vont se procurer des armes d’attaque. Cela dépasse le cadre de la défense (…) et va faire monter les tensions », a, de son côté, réagi le président de la RTCN, Ersin Tatar, samedi 17 septembre, sur la chaîne turque TRT Haber.
M. B.