mardi 22 octobre 2024
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Violents affrontements à la frontière entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan

Montée de tension dans le Caucase du Sud cette nuit du 12 au 13 septembre. Les forces de l’Azerbaïdjan ont tiré à l’arme lourde sur plusieurs positions en territoire arménien, le long de la frontière internationale autour de la région disputée du Haut-Karabakh.

Les tirs d’artillerie et d’armes de gros calibre ont commencé juste après minuit, ce mardi 13 septembre, en territoire arménien, tout le long de la frontière avec l’Azerbaïdjan autour de la province sécessionniste du Haut-Karabakh. Les régions de Goris, Sotk et Djermouk ont été touchées, selon les explications de notre correspondant régional.

C’est cette région du Haut-Karabakh, enclavée en Azerbaïdjan, qui a fait l’objet d’une guerre de 44 jours il y a deux ans. Les Azéris avaient repris le contrôle de tous les territoires occupés autour du Haut-Karabakh et d’une partie de la province elle-même. Ce court conflit a fait 6 500 morts et s’est terminé par un cessez-le-feu négocié par la Russie, document qui, selon Bakou, est loin d’avoir été mis en œuvre.

Au moins 49 soldats arméniens tués

Mardi matin, le Premier ministre arménien, Nikol Pachinian, avait déclaré qu’au moins 49 soldats avaient été tués par les tirs azéris dans un bilan provisoire, tandis que l’Azerbaïdjan revendique aussi des victimes sans toutefois donner de bilan précis. Cette montée de tension n’est pas vraiment une surprise, bien que ces derniers mois le Premier ministre arménien et le président azerbaïdjanais, Ilham Aliev, ont fait de gros pas vers un accord de paix global, sous la houlette de l’Union européenne. Mais l’été s’est avéré tendu dans et autour du Haut-Karabakh.

Ces nouvelles tensions n’ont pas grand-chose à voir avec le fait que la Russie, qui a déployé, fin 2020, au Haut-Karabakh une force d’interposition de près de 2 000 hommes, est très occupée sur le front ukrainien. Il y a déjà eu plusieurs montées de tensions similaires à la frontière azéro-arménienne depuis deux ans, même si elles étaient moins fortes.

Mais selon Charles Urjewicz, professeur émérite à l’Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco), « profiter singulièrement ces jours-ci du recul russe, pour Bakou, c’est une formidable opportunité que d’attaquer un pays qui, par ailleurs, se trouve dans une situation accolée au géant russe ».

Cette fois-ci encore, Bakou semble reprocher à l’Arménie de traîner des pieds pour mettre en œuvre chaque point du cessez-le-feu du 9 novembre 2020, entre autres le retrait des formations armées arméniennes présentes au Haut-Karabakh, soit sur son territoire, du point de vue de Bakou. Un autre des points du cessez-le-feu est l’ouverture d’une route à travers le territoire arménien, laquelle doit permettre une liaison directe entre l’Azerbaïdjan et sa région autonome du Nakhitchevan, à la frontière turque.

Cessez-le-feu

Dans la nuit, le gouvernement arménien a décidé de se tourner vers la Russie pour obtenir de l’aide en vertu du traité d’amitié entre les deux pays. Un cessez-le-feu a été annoncé dans la matinée, ce mardi. La Russie a déclaré avoir négocié ce cessez-le-feu. « Nous attendons que l’accord conclu à la suite d’une médiation russe sur un cessez-le-feu à partir de 9h, heure de Moscou [6h TU], sera respecté dans son intégralité », a déclaré dans un communiqué la diplomatie russe, se disant « extrêmement préoccupée par la nette dégradation de la situation ».

L’Iran a appelé mardi l’Azerbaïdjan et l’Arménie à la « retenue », après la reprise de violents combats à la frontière entre les deux pays, voisins de la République islamique dans le nord. Le ministre turc des Affaires étrangères, Mevlüt Çavusoglu, a appelé mardi l’Arménie à « cesser ses provocations » contre l’Azerbaïdjan.

De son côté, le Premier ministre arménien, Nikol Pachinian, a eu des entretiens avec le président russe Vladimir Poutine, son homologue français Emmanuel Macron et le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken pour leur demander de réagir face à l’« agression » de l’Azerbaïdjan, selon Erevan. La France va saisir le Conseil de sécurité de l’ONU après ces nouveaux affrontements, avait  annoncé  mardi matin l’Élysée.

Le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, a aussi appelé mardi les dirigeants d’Azerbaïdjan et d’Arménie pour les exhorter à parvenir à un règlement pacifique. M. Blinken a dit aux dirigeants des deux pays que les États-Unis allaient « faire pression pour un arrêt immédiat des combats et un accord de paix entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan », a indiqué à la presse le porte-parole du département d’État, Ned Price. Même réaction du côté de l’ONU, le secrétaire générale de l’organisation onusienne a appelé ce mardi à « désamorcer les tensions ».

Plus tard dans la journée, l’Azerbaïdjan a affirmé avoir « rempli tous ses objectifs » à la frontière avec l’Arménie. « Les provocations commises par les forces arméniennes à la frontière entre les deux pays ont été repoussées, tous les objectifs ont été remplis », a déclaré dans un communiqué le bureau du président azerbaïdjanais, Ilham Aliev, pour qui « la responsabilité de l’escalade incombe entièrement aux dirigeants politiques arméniens ».

M. B.